22 Octobre 2019
Le romancier et universitaire Amin Zaoui a proposé, dans un post publié dimanche 20 octobre sur sa page Facebook, le nom de Saïd Sadi, ancien président du RCD, pour être parmi les dirigeants de “la période de transition”. Pour l’écrivain, cette période est la solution à l’impasse politique actuelle en Algérie.
Vous plaidez pour « une période de transition » comme une solution à la crise politique en Algérie. Et, vous proposez Saïd Sadi comme des leaders de cette période. Pourquoi ?
Said Sadi est d’abord un intellectuel. Il a notamment écrit un livre sur le chanteur et musicien Chérif Khedam ( «Chérif Kheddam, le chemin du devoir », paru en 2017). Il possède une longue expérience politique et est un fin observateur. Il est indépendant des partis. Il a une vision qui complète les autres visions tout en étant autonome.
Dans une Algérie diversifiée, ouverte aux nationalistes, aux islamistes et laïcs, Saïd Sadi sera une personnalité centrale. A mon avis, Saïd Sadi n’est pas pollué sur le plan politique. Il a gardé une certaine marge de manœuvre pour la critique, s’attachant à sa liberté. En même temps, il n’était pas éloigné de l’Etat et du pouvoir mais était toujours critique.
Saïd Sadi représente toutes les tendances de l’alternative démocratique, même si certaines ailes et certaines personnalités sont réservées à l’égard de l’homme. Mais, il reste l’homme rassembleur qui peut parler au nom de ce courant politique. Il n’existe pas de solution à la crise politique actuelle sans période de transition. Et aucune période de transition n’est possible sans Saïd Sadi parce qu’il s’exprime au nom d’une large frange de la société algérienne. Sa présence aide à protéger l’unité nationale, menacée par certains courants.
L’élection présidentielle du 12 décembre 2019 n’est-elle pas une solution à la crise politique pour vous ?
Il y a une colère populaire. Et, il y a certains qui veulent pousser à la division. L’élection n’est pas une solution à l’heure actuelle. Elle le sera lorsque les conditions seront réunies. Élire un président dans la situation actuelle va entraîner une contestation de sa légitimité. Il aura une difficulté à mener les réformes que les algériens attendent et que le hirak revendique.
Quel rôle pourrait jouer l’élite dans pareilles situations, dans « une période de transition » ?
Il faut vider la période de transition de tout contenu idéologique et politicien. Il faut aller vers une période où les élites techniques, intellectuelles, économiques, sociales, commerciales et culturelles auront l’occasion de lire les événements d’une manière apaisée. Des élites qui seront dans l’action, pas dans la réaction. Une action construite à partir d’une bonne et profonde analyse de la situation.
Pour les autorités, « la période de transition » est porteuse de dangers et peut mener l’Algérie vers l’aventure. Vous en pensez quoi ?
Ce que je sais est que la période de transition rassure les algériens. Nous ne sommes pas dans une course de 2000 ou 1000 mètres. Nous sommes dans une phase de construction d’une Histoire. Histoire d’une nation qui ne peut pas être une course. Une période de transition avec une direction collégiale composée de personnalités pouvant faire des propositions est mieux que d’aller vers une aventure électorale amoindrie. La période de transition ne fait peur qu’à ceux qui pensent que cela est un détournement de la démocratie. L’élection est la dernière phase qui permettra d’aller vers des rivages sûrs. L’élection exige une bonne et propre préparation qui évitera à l’Algérie de retomber dans le recyclage du système politique, de la corruption et des anciennes figures.
Comment peuvent contribuer les hommes de lettres, les romanciers notamment, pour régler la crise politique dans le pays ?
L’intellectuel est d’abord un citoyen qui a un regard plus profond et plus global sur la situation. Il doit jouer un rôle dans la période actuelle. Il doit écrire, être présent, contribuer aux débats, participer directement aux actions, faire des propositions, bref, dans tout ce qui peut servir les intérêts du pays. Le romancier ne vit pas dans une haute tour avec ses idées utopiques. Il est le fruit de la réalité sociale.